Le Togolais Gilbert Houngbo, directeur général de l’Organisation internationale du travail (OIT), a mis en lumière les enjeux liés à l’impact de l’IA sur le monde du travail. Il est intervenu lors d’une table ronde à l’occasion du sommet sur l’intelligence artificielle organisé à Paris, les 10 et 11 février 2025. Reconnaissant la capacité de l’IA à automatiser de nombreuses tâches répétitives, il a souligné que cette évolution pourrait, à terme, transformer profondément le paysage professionnel.
« C’est quelque chose dont on parle depuis un certain temps et, surtout, c’est quelque chose qui existe déjà », a affirmé M. Houngbo, insistant sur la nécessité d’une préparation adéquate des travailleurs face à ces changements. Il a également mis en évidence une dimension de genre préoccupante : « Nous savons que la plupart des emplois qui seront automatisés seront des emplois dans lesquels nous avons une majorité de femmes qui travaillent ». Il a cité des secteurs tels que les centres d’appels, la rédaction, et la création de contenus, où l’IA générative est déjà largement déployée.

Le directeur de l’OIT a exprimé une préoccupation particulière concernant les suppressions de postes potentielles : « Si les entreprises peuvent remplacer les travailleurs par des robots, il est très probable qu’elles le fassent ». Il a averti que ces suppressions pourraient accentuer les inégalités entre les sexes, une tendance qu’il juge préoccupante et qui requiert une attention soutenue.
Bien que l’IA génère actuellement plus d’emplois qu’elle n’en détruit, M. Houngbo a souligné que cette dynamique ne garantit pas nécessairement la stabilité des travailleurs. « Il faut un véritable soutien aux employés affectés par ces transformations, sinon l’IA creusera encore plus les inégalités sociales », a-t-il averti. Les nouveaux emplois créés sont souvent caractérisés par une plus grande précarité, des rémunérations plus faibles, et un accès limité aux protections sociales.

Pour atténuer les effets disruptifs de l’automatisation, M. Houngbo a plaidé pour une transformation des politiques de formation et de protection sociale. « Ce n’est pas l’intelligence artificielle qui va nous prendre notre emploi, mais le manque de préparation pour développer de nouvelles compétences dans ce contexte », a-t-il déclaré. Il a insisté sur la nécessité de renforcer les dispositifs de formation continue afin d’aider les travailleurs à acquérir les compétences nécessaires pour s’adapter aux mutations du marché.
L’intelligence artificielle représente une opportunité et un défi. Si elle offre de nouvelles perspectives économiques, son déploiement sans mesures d’accompagnement adéquates risque d’amplifier les inégalités existantes. Une anticipation des transformations, couplée à un effort soutenu en matière de formation et de protection sociale, est indispensable pour garantir un avenir professionnel plus équitable.
En vidéo, la table-ronde sur l’IA et l’avenir du travail .